11 serait sans doute plus prudent de ne rien dire des cinq personnages
agenouilles: nous ne savons meme pas s'ils represented trois ou cinq
personnes^ et si les inscriptions gravees a proximite les designed.
J'ai quand meme releve tout au long de cette etude un certain nombre
d'indices dont il me faut bien tirer une conclusion, si douteuse soit-elle.
Je demanderai seulement au lecteur de bien garder a l'esprit que les
analyses qui vont suivre permettent seulement d'enoncer des hypotheses
et que ces hypotheses me paraissent a moi-meme fort risquees.
11 est probable que le triptyque de Shatial represente une commande
faite a un artiste professional par des devots de passage. Cette hypo-
these permet d'expliquer a la fois le choix du rappelant aux
commanditaires du dessin un lieu saint ou ils seraient passes, et le fait
que le profil du ne rappelle en rien celui de l"Asoka tope' bati a
l'endroit ou le roi des Sibis voulut se sacrifier pour sauver un pigeon: si
l'artiste qui dessina le .stupa du .siM-yafaka ne l'avait pas vu de ses yeux,
la meilleure raison qu'il aurait eu de le dessiner aurait ete de repondre
a une commande de voyageurs qui, eux, s'y etaient rendus.
Cet artiste etait un bouddhiste laic, plus preoccupe de la signification
profonde de la legende que d'exactitude anecdotique. Laccent mis sur
la personne du Buddha, les flammes dont celle-ci est entouree indiquent
une devotion profonde, allant jusqu'au mysticisme. Forme a l'ecole du
Gandhara, l'auteur du triptyque de Shatial connaissait probablement le
Swat.^ Sa technique etait celle d'un peintre (manque de profondeur,
gout de certains details, dessins en clair sur fond noir reserve - ce qui
correspond en peinture a des dessins en noir ou rouge sur fond clair),
pas d'un sculpteur. C'etait un virtuose du dessin, assez sur et assez fier
de son art pour ne pas travailler a partir de poncifs: il melait aux recet-
tes heritees un gout du decor tout a fait personnel, un eclectisme qui le
poussait a recomposer les images et a inventer de nouveaux schemas
narratifs, une audace qui lui faisait preferer l'effet a la veracite, une
connaissance certaine du gout local. Les dessins de Shatial ne sont ni
l'oeuvre d'un amateur, ni celle d'un artisan. Leur auteur etait un artiste
170 p. 37.
171 tSHpra, p. 27 et pp. 33-34.
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