meme recueil, la traduction frangaise de par "pare des gazel-
les" ou "enclos des antilopes" est un pis-aller du au fait qu'il n'existe
dans notre langue aucun mot ayant la precise imprecision du Sanskrit
mrga. Tare des gazelles' est simplement une traduction poetique de la
notion indienne d'ashram (avama), endroit isole dans la foret, loin des
habitations et de la violence humaine, et respirant tellement la paix que
les betes sauvages meme les plus craintives, s'y melent aux hom-
ines. Les artistes indiens ont pris l'habitude de symboliser l'ashram de
Benares par deux des betes qui le frequentaient, de celles qui passent
pour les plus demunies de protection contre la violence, les plus crainti-
ves done, et qui se laissent le moins domestiquer, je veux dire deux anti-
lopes. Les varietes africaines d'antilopes se nomment gazelles. Certains
auteurs, dont moi-meme, trouvent que 'pare des gazelles' sonne mieux
a l'oreille que 'pare des antilopes' et e'est pourquoi dans tout cet article
j'utiliserai le mot 'pare des gazelles' pour traduire et 'gazelle'
pour traduire, dans ce contexte, Sanskrit je ne dispose pas d'autre
mot frangais, anglais ou allemand pour ce faire.
Cette traduction a deux inconvenients contradictoires: le mot 'gazelle',
outre qu'il s'applique a un animal africain, est trompeur car sa significa-
tion est plus limitee que celle du mot Sanskrit (mrga) qu'il est cense tra-
duire; il est egalement trompeur parce que les animaux represents sont
aujourd'hui, grace a l'article de D. Konig, identifiables de fagon beau-
coup plus precise. Or cette identification zoologique pose probleme a
l'historien de l'art indien: il est desormais tout a fait clair que les ani-
maux qui symbolisent par leur seule presence le appartien-
nent, selon la representation consideree, a des especes d'antilopes diffe-
rentes, e'est-a-dire comportent une part d'observation de la realite. S'il
en est ainsi, revolution du motif n'est plus un probleme d'histoire des
conventions artistiques: elle resulte du choix personnel d'un individu qui
decide de representer - pour des raisons de gout qui lui sont propres -
tel animal plutot que tel autre. Lhistoire de l'art, e'est-a-dire l'histoire
du changement des traditions iconographiques et artistiques, ne peut a
elle seule expliquer ce choix. Dans ce cas, les pages qui vont suivre sont
pur jeu speculatif.
Mais l'historien de l'art qui etudie les representations, relativement peu
nombreuses, de ce /akyana dans l'art du Gandhara ou dans l'art tibetain
est surtout frappe par le caractere stereotype du motif. La scene est tou-
jours la meme, deux animaux couches de part et d'autre d'une roue. Le
motif est toujours compose de la meme fagon et sa place ne varie
62
les" ou "enclos des antilopes" est un pis-aller du au fait qu'il n'existe
dans notre langue aucun mot ayant la precise imprecision du Sanskrit
mrga. Tare des gazelles' est simplement une traduction poetique de la
notion indienne d'ashram (avama), endroit isole dans la foret, loin des
habitations et de la violence humaine, et respirant tellement la paix que
les betes sauvages meme les plus craintives, s'y melent aux hom-
ines. Les artistes indiens ont pris l'habitude de symboliser l'ashram de
Benares par deux des betes qui le frequentaient, de celles qui passent
pour les plus demunies de protection contre la violence, les plus crainti-
ves done, et qui se laissent le moins domestiquer, je veux dire deux anti-
lopes. Les varietes africaines d'antilopes se nomment gazelles. Certains
auteurs, dont moi-meme, trouvent que 'pare des gazelles' sonne mieux
a l'oreille que 'pare des antilopes' et e'est pourquoi dans tout cet article
j'utiliserai le mot 'pare des gazelles' pour traduire et 'gazelle'
pour traduire, dans ce contexte, Sanskrit je ne dispose pas d'autre
mot frangais, anglais ou allemand pour ce faire.
Cette traduction a deux inconvenients contradictoires: le mot 'gazelle',
outre qu'il s'applique a un animal africain, est trompeur car sa significa-
tion est plus limitee que celle du mot Sanskrit (mrga) qu'il est cense tra-
duire; il est egalement trompeur parce que les animaux represents sont
aujourd'hui, grace a l'article de D. Konig, identifiables de fagon beau-
coup plus precise. Or cette identification zoologique pose probleme a
l'historien de l'art indien: il est desormais tout a fait clair que les ani-
maux qui symbolisent par leur seule presence le appartien-
nent, selon la representation consideree, a des especes d'antilopes diffe-
rentes, e'est-a-dire comportent une part d'observation de la realite. S'il
en est ainsi, revolution du motif n'est plus un probleme d'histoire des
conventions artistiques: elle resulte du choix personnel d'un individu qui
decide de representer - pour des raisons de gout qui lui sont propres -
tel animal plutot que tel autre. Lhistoire de l'art, e'est-a-dire l'histoire
du changement des traditions iconographiques et artistiques, ne peut a
elle seule expliquer ce choix. Dans ce cas, les pages qui vont suivre sont
pur jeu speculatif.
Mais l'historien de l'art qui etudie les representations, relativement peu
nombreuses, de ce /akyana dans l'art du Gandhara ou dans l'art tibetain
est surtout frappe par le caractere stereotype du motif. La scene est tou-
jours la meme, deux animaux couches de part et d'autre d'une roue. Le
motif est toujours compose de la meme fagon et sa place ne varie
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