indien par deux gazelles femelles, ou un couple male et femelle, ou un
couple unicorne et femelle? J'avoue que je ne m'etais jamais pose la
question. Habitant des villes, les seuls animaux qui me sont familiers
sont le chien, le chat et le rat de bibliotheque. Comme me l'a reproche
Ditte Konig, je fais partie de ces philologues qui ne soucient pas de sa-
voir si le mrga du Sanskrit, le du tibetain, mammifere non do-
mestique indifferencie et asexue, est vraiment represente par une anti-
lope et qui ne s'interrogent pas sur la multiplicity des especes d'antilo-
pes. A dire vrai, certains reliefs du Gandhara donnent meme a ces anti-
lopes l'apparence d'un belier ou d'un bouquetin.^ Quant au sexe de
ces animaux, il m'etait a peu pres aussi etranger que celui des anges. D.
Konig eut vite fait de me demontrer que j'avais tort: si Ton n'accorde
aucune attention aux details anatomiques, c'est-a-dire dans ce cas precis
aux comes de Tanimal qui permettent d'en dire parfois le sexe et l'espe-
ce, on ne s'apergoit pas de la distorsion qui existe entre representations
indiennes et representations tibetaines, et on n'essaie pas non plus de
l'expliquer.
Or la distorsion n'existe pas. Un rocher de Thalpan, que mes collegues
et moi-meme avons plusieurs fois admire depuis 1979 et meme pu-
blie,^ porte une representation classique du ^/tarma-cakra-pravarrana
de Benares (Bg. 9). On y retrouve tous les elements de la representation
gandharienne: le Buddha aureole assis, entoure par les cinq premiers
disciples egalement assis; devant lui, la roue de la Loi, ici placee au
sommet d'un mat ou d'une colonne, encadree par deux gazelles. Mais
alors qu'au Gandhara, dans cette scene, les mains du Buddha forment
normalement 1'aMaya-maJra, symbole de la liberation qu'apporte le
message du Buddha, elles sont a Thalpan en ^/tawia-cakra-ma^ra, sym-
bole de l'enseignement. Surtout on a l'impression que la composition re-
leve plus de la peinture que de la sculpture. Sur les bas-reliefs du Gan-
dhara, la scene occupe en effet un panneau rectangulaire et les six per-
sonnages sont disposes cote a cote, souvent en position frontale. Le gra-
veur du rocher de Thalpan joue sur la hauteur pour donner une impres-
sion de perspective: les premiers disciples et les gazelles forment com-
44 KURITA 1988-90: vol. I, p. 148, n° 269; p. 149, n° 280.
45 DANI 1983: colour plate 6, pp. 142-143; JETTMAR 1982: pi. 7; JETTMAR 1983: 28,
Blld 7; THEWALT 1985: 796-798, fig. 22. JETTMAR/THEWALT 1985: Tafel 14, Photo
22. Et meme FussMAN 1993: pi. 8!
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couple unicorne et femelle? J'avoue que je ne m'etais jamais pose la
question. Habitant des villes, les seuls animaux qui me sont familiers
sont le chien, le chat et le rat de bibliotheque. Comme me l'a reproche
Ditte Konig, je fais partie de ces philologues qui ne soucient pas de sa-
voir si le mrga du Sanskrit, le du tibetain, mammifere non do-
mestique indifferencie et asexue, est vraiment represente par une anti-
lope et qui ne s'interrogent pas sur la multiplicity des especes d'antilo-
pes. A dire vrai, certains reliefs du Gandhara donnent meme a ces anti-
lopes l'apparence d'un belier ou d'un bouquetin.^ Quant au sexe de
ces animaux, il m'etait a peu pres aussi etranger que celui des anges. D.
Konig eut vite fait de me demontrer que j'avais tort: si Ton n'accorde
aucune attention aux details anatomiques, c'est-a-dire dans ce cas precis
aux comes de Tanimal qui permettent d'en dire parfois le sexe et l'espe-
ce, on ne s'apergoit pas de la distorsion qui existe entre representations
indiennes et representations tibetaines, et on n'essaie pas non plus de
l'expliquer.
Or la distorsion n'existe pas. Un rocher de Thalpan, que mes collegues
et moi-meme avons plusieurs fois admire depuis 1979 et meme pu-
blie,^ porte une representation classique du ^/tarma-cakra-pravarrana
de Benares (Bg. 9). On y retrouve tous les elements de la representation
gandharienne: le Buddha aureole assis, entoure par les cinq premiers
disciples egalement assis; devant lui, la roue de la Loi, ici placee au
sommet d'un mat ou d'une colonne, encadree par deux gazelles. Mais
alors qu'au Gandhara, dans cette scene, les mains du Buddha forment
normalement 1'aMaya-maJra, symbole de la liberation qu'apporte le
message du Buddha, elles sont a Thalpan en ^/tawia-cakra-ma^ra, sym-
bole de l'enseignement. Surtout on a l'impression que la composition re-
leve plus de la peinture que de la sculpture. Sur les bas-reliefs du Gan-
dhara, la scene occupe en effet un panneau rectangulaire et les six per-
sonnages sont disposes cote a cote, souvent en position frontale. Le gra-
veur du rocher de Thalpan joue sur la hauteur pour donner une impres-
sion de perspective: les premiers disciples et les gazelles forment com-
44 KURITA 1988-90: vol. I, p. 148, n° 269; p. 149, n° 280.
45 DANI 1983: colour plate 6, pp. 142-143; JETTMAR 1982: pi. 7; JETTMAR 1983: 28,
Blld 7; THEWALT 1985: 796-798, fig. 22. JETTMAR/THEWALT 1985: Tafel 14, Photo
22. Et meme FussMAN 1993: pi. 8!
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