Jean Malalas et la mémoire d’Antioche 181
dressa, à l’extérieur du temple deux grandes statues des Dioscures [...] Il aménagea
aussi le théâtre, en ajoutant une série de gradins du côté du mont (προς τω όρεθ
et sacrifia une jeune vierge du nom d’Antigonè ; il n’acheva pas entièrement (ούκ
έπλήρωσεν εις τέλειον) le théâtre. Au-dessus de la Porte orientale επάνω τής
ανατολικής πόρτας) que lui-même fit édifier, il dressa une statue de pierre de la
louve nourrissant Rômos et Rémos, pour signifier que le rempart ajouté à la ville
était un édifice romain. Il édifia aussi, derrière le théâtre (όπισθεν του θεάτρου),
un sanctuaire de Pan. Voilà ce qu’a exposé Domninos, le savant chroniqueur.32
Dans ce nouvel espace urbain élargi, c’est la situation relative des monuments qui est
désormais privilégiée. Mais, nous le verrons, cette situation relative soulève de réelles
difficultés. Dans l’immédiat on peut constater que certains monuments servent en
quelque sorte de marqueurs : les Portes (ici la « Porte orientale ») permettent de se si-
tuer par rapport à la nouvelle enceinte.33 Le théâtre césarien devient un point de repère
majeur, avec ses agrandissements successifs par Agrippa34, Tibère et enfin Trajan,35 qui
constituent ce que C. Saliou a identifié comme un « cycle narratif» dans la Chronique?^
C’est par rapport à ce théâtre, mentionné d’abord comme un théâtre, puis comme le
théâtre, ou comme le théâtre d'Antioche, que Malalas situe désormais un certain nombre
d’autres monuments : le sanctuaire de Pan édifié par Trajan derrière le théâtre (c’est-à-
dire très vraisemblablement en amont), le temple de Vents, que Vespasien élève près du
théâtre (πλησίον τού θεάτρου).3?
Un autre monument césarien, l’amphithéâtre, sert à son tour d’élément de localisa-
tion pour les constructions de Domitien :
Domitien édifia à Antioche la Grande un bain public, celui qu’on appelle «bain
de Médée » parce qu’il y avait dressé une admirable statue de Médée : c’est le nom
que les citoyens donnaient au bain public et non plus celui de Domitianon. Ce bain
public était édifié sur le flanc de la montagne (παρά τό όρος) près de l’amphithéâ-
tre et du temple d’Aphrodite, (πλησίον τού μονομαχίου καί τού ιερού τής
Αφροδίτης). À cet endroit l’empereur édifia aussi un temple d’Asclépios.38
32 Malalas, Chronographia^ 10.
33 Sur la « porte orientale » de Tibère (située en réalité au nord-est de l’enceinte) et les autres portes d’An-
tioche mentionnées par Malalas, voir Downey (1961), p. 615-621.
34 Malalas, Chronographia IX 14: προσέθηκε δε κτίσας έν τω θεάτρω Αντιόχειας άλλην ζώνην
επάνω τής πρώτης διά τόν πολύν δήμον ό Αγρίππας. «Agrippa ajouta aussi au théâtre d’Antioche
une autre série de gradins qu’il édifia au-dessus de la première, à cause de l’importance de la population.»
35 Malalas, Chronographia XI 9 : καί τό θέατρον δε τής αυτής Αντιόχειας άνεπλήρωσεν άτελες
ον, στήσας έν αύτώ ύπεράνω τεσσάρων κιόνων έν μέσω τού νυμφαίου του προσκηνίου
τής σφαγιασθείσης ύπ' αυτού κόρης στήλην χαλκήν κεχρυσωμένην. «Il acheva aussi le
théâtre d’Antioche, qui était resté inachevé. Et là, au sommet de quatre colonnes au milieu du nymphée
de l’avant-scène, il plaça une statue en bronze doré de la jeune fille qu’il avait sacrifiée.»
36 Saliou (2016), p. 72-73.
37 Malalas, Chronographia X 46: Έκτισε δε καί έν Αντιόχεια τή μεγάλη πλησίον τού θεάτρου
ιερόν, ο έκάλεσε τών Ανέμων. «Il édifia aussi à Antioche la Grande, près du théâtre, un temple
qu’il appela le temple des Vents.»
38 Malalas, Chronographia X 50.
dressa, à l’extérieur du temple deux grandes statues des Dioscures [...] Il aménagea
aussi le théâtre, en ajoutant une série de gradins du côté du mont (προς τω όρεθ
et sacrifia une jeune vierge du nom d’Antigonè ; il n’acheva pas entièrement (ούκ
έπλήρωσεν εις τέλειον) le théâtre. Au-dessus de la Porte orientale επάνω τής
ανατολικής πόρτας) que lui-même fit édifier, il dressa une statue de pierre de la
louve nourrissant Rômos et Rémos, pour signifier que le rempart ajouté à la ville
était un édifice romain. Il édifia aussi, derrière le théâtre (όπισθεν του θεάτρου),
un sanctuaire de Pan. Voilà ce qu’a exposé Domninos, le savant chroniqueur.32
Dans ce nouvel espace urbain élargi, c’est la situation relative des monuments qui est
désormais privilégiée. Mais, nous le verrons, cette situation relative soulève de réelles
difficultés. Dans l’immédiat on peut constater que certains monuments servent en
quelque sorte de marqueurs : les Portes (ici la « Porte orientale ») permettent de se si-
tuer par rapport à la nouvelle enceinte.33 Le théâtre césarien devient un point de repère
majeur, avec ses agrandissements successifs par Agrippa34, Tibère et enfin Trajan,35 qui
constituent ce que C. Saliou a identifié comme un « cycle narratif» dans la Chronique?^
C’est par rapport à ce théâtre, mentionné d’abord comme un théâtre, puis comme le
théâtre, ou comme le théâtre d'Antioche, que Malalas situe désormais un certain nombre
d’autres monuments : le sanctuaire de Pan édifié par Trajan derrière le théâtre (c’est-à-
dire très vraisemblablement en amont), le temple de Vents, que Vespasien élève près du
théâtre (πλησίον τού θεάτρου).3?
Un autre monument césarien, l’amphithéâtre, sert à son tour d’élément de localisa-
tion pour les constructions de Domitien :
Domitien édifia à Antioche la Grande un bain public, celui qu’on appelle «bain
de Médée » parce qu’il y avait dressé une admirable statue de Médée : c’est le nom
que les citoyens donnaient au bain public et non plus celui de Domitianon. Ce bain
public était édifié sur le flanc de la montagne (παρά τό όρος) près de l’amphithéâ-
tre et du temple d’Aphrodite, (πλησίον τού μονομαχίου καί τού ιερού τής
Αφροδίτης). À cet endroit l’empereur édifia aussi un temple d’Asclépios.38
32 Malalas, Chronographia^ 10.
33 Sur la « porte orientale » de Tibère (située en réalité au nord-est de l’enceinte) et les autres portes d’An-
tioche mentionnées par Malalas, voir Downey (1961), p. 615-621.
34 Malalas, Chronographia IX 14: προσέθηκε δε κτίσας έν τω θεάτρω Αντιόχειας άλλην ζώνην
επάνω τής πρώτης διά τόν πολύν δήμον ό Αγρίππας. «Agrippa ajouta aussi au théâtre d’Antioche
une autre série de gradins qu’il édifia au-dessus de la première, à cause de l’importance de la population.»
35 Malalas, Chronographia XI 9 : καί τό θέατρον δε τής αυτής Αντιόχειας άνεπλήρωσεν άτελες
ον, στήσας έν αύτώ ύπεράνω τεσσάρων κιόνων έν μέσω τού νυμφαίου του προσκηνίου
τής σφαγιασθείσης ύπ' αυτού κόρης στήλην χαλκήν κεχρυσωμένην. «Il acheva aussi le
théâtre d’Antioche, qui était resté inachevé. Et là, au sommet de quatre colonnes au milieu du nymphée
de l’avant-scène, il plaça une statue en bronze doré de la jeune fille qu’il avait sacrifiée.»
36 Saliou (2016), p. 72-73.
37 Malalas, Chronographia X 46: Έκτισε δε καί έν Αντιόχεια τή μεγάλη πλησίον τού θεάτρου
ιερόν, ο έκάλεσε τών Ανέμων. «Il édifia aussi à Antioche la Grande, près du théâtre, un temple
qu’il appela le temple des Vents.»
38 Malalas, Chronographia X 50.